4h du matin, une alarme retentie. Le corps est fatigué mais l'esprit est déjà bien réveillé. Nos paupières tremblent, nos pupilles vacillent, nos yeux s'ouvrent enfin alors que notre regard se
fixe d'un coup au plafond. Un regard plein de détermination, de motivation, de rage de vaincre. Un regard, un œil, unique: l'œil du tigre !!!
Nous sautons de notre lit
♪TUN♪
"Gros plan sur nos pantalons", enfilés, boucle de ceinture fermée
♪TUN TAN TUN♪
"Gros plans sur nos chaussures", lacets tirés, chaussettes remontées
♪TUN TAN TUN♪
"Gros plan sur nos épaules", veste enfilée, sangles de sacs à dos serrées
♪TUN TAN TEEEEEUUUUU♪♪♪♪♪♪♪♪♪♪♪♪♪♪♪♪♪♪♪♪♪
"Plan s'élargissant sur nos silhouettes", nos mains sur les hanches, emboîtant notre pas vers la porte de notre chambre
♪THE EYE OF THE TIGEEEEERRRRRR !!!!!♪
Nous descendons les étages, chaque marche descendue marquée par le rythme de la musique qui se déroule dans nos esprits concentrés jusqu'à atteindre l'accueil de notre auberge
♪IT'S THE EYE OF THE TI... Quoi ???!!!!!!
Nous bloquons devant la porte d'entrée fermée à clef. Malgré nos échanges de la veille avec le réceptionniste, et propriétaire des lieux, à propos de notre programme d'aujourd'hui, rien n'a été
finalement fait pour nous permettre de sortir plus tôt de notre hébergement.
Nous sommes le 12 Avril 2014, il est 4h30 du matin, un lampadaire publique et une porte en verre donnant sur le rez-de-chaussée d'une bâtisse située à Aguas Calientes laissent entrevoir 2
silhouettes mal réveillées se dessiner dans la pénombre, l'une accrochée à une poignée de porte, l'autre à son sac à dos, immobiles, silencieuses, paralysées par la cocasserie et
l'imprévisibilité du moment. Comment penser que les difficultés puissent survenir si tôt dans notre expédition? Rocky a t-il jamais eu ce problème avant de partir s'entraîner pour son combat? Et
à quoi aurait-il ressemblé si au lieu de le voir grimper des marches 4 à 4 avant de sauter de joie à côté de sa statut dans un accomplissement physique indiscutable, on l'avait vu fixer une
poignée de porte pendant ces 3 minutes de musique sensées souligner un nouvel élan à un moment critique du film... ???? À rien, c'est certain.
C'est donc dans un esprit balboa-esque que nous décidons de sortir de notre torpeur, lampe torche fixée au front, afin de rechercher une éventuelle clef nous permettant de nous sortir de cette
situation.
Après quelques minutes à fouiller tiroirs, étagères et bureau, entre bibelots, cahiers et statues, nous finissons par mettre la main sur notre sésame, "bien caché", dans un joli cendrier en
rotin... À nous la liberté !!!
Lampes fixées sur nos têtes, nous traversons donc la ville plongée dans le calme et l'obscurité, croisant ici et là d'autres groupes également décidés à rejoindre cette procession étrange nous
conduisant à emprunter ce même chemin, ce même néant apparent, à travers la jungle.
Après une première marche d'une demi-heure, marquée par une quasi-solitude et une immersion dans un noir absolu, nous aboutissons à l'entrée du parc du Machu Picchu, nous faisant passer en un
instant du parc naturel au parc Astérix. En effet, l'entrée du pont vers le Macchu Picchu marque un goulot d'étranglement où tous les visiteurs matinaux dont nous faisons partie (ce sera bien une
des seules fois où l'on pourra être rangé dans cette catégorie !!!) viennent s'agglutiner pour montrer leur ticket, sésame (encore un !!!) pour la perle Inca.
Une fois affranchis de cette formalité, nous passons le pont et nous nous joignons à la foule alignée le long du chemin étroit et escarpé montant vers la cité antique. Le jour commence enfin à se
lever alors que nos premiers litres de sueur commencent à alourdir nos vêtements et nous poussent à retirer des couches de tissu de nos épaules. Avec la luminosité, la brume qui enveloppe toute
la vallée, et dans laquelle nous évoluons depuis nos premiers mètres parcourus, se fait plus présente à nos yeux. Le paysage, mélange de vert imminemment palpable et de blanc infiniment
insaisissable, souligne le mysticisme de l'objet de notre convoitise.
Les respirations se font de plus en plus fortes, les signes de fatigue de plus en plus visibles, l'excitation de plus en plus perceptible autour de nous.
Finalement, après deux heures d'ascension, nous parvenons enfin à l'entrée du site, soulagés... Mais pas le temps de se reposer !!! Effectivement, ayant eu la chance de nous procurer 2 des 200 très prisés tickets permettant d'accéder, à partir de 7h et seulement jusqu'à 8h15, au célèbre Wayna Picchu dominant la cité Inca, il nous faut maintenir notre effort de marche. Ainsi, c'est au pas course que nous traversons les ruines pour atteindre l'autre bout du site, notre précipitation et le brouillard omniprésent nous empêchant de réaliser où nous sommes réellement.
7h sonnant, nous pénétrons sur le domaine du Wayna Picchu et entamons une nouvelle ascension, plus abrupte, plus physique et plus escarpée encore que la première. La brume, toujours bien présente, semble désormais nous envelopper d'un voile épais et humide, comme dans une ultime tentative de résistance contre l'inéluctable alors que la chaleur du jour menace de la faire définitivement disparaître. Ne voyant pas à plus de 10m, c'est donc dans les nuages que nous évoluons désormais, accrochés à un rocher lui même paraissant détaché de la terre ferme... Hallucinant !!!
Après donc deux nouvelles heures à gravir cette roche, nous arrivons enfin au sommet du mont où une nouvelle ville, ce château dans le ciel, a été construit comme pour dominer les cumulus.
Perchés là-haut, nous attendons que le rideau blanc qui nous entoure capitule définitivement, se lève, et laisse enfin la vedette se dévoiler sur sa scène montagneuse... Magnifique Machu
Picchu !!!
Les premières centaines de photos de la journée prises, nous redescendons alors dans la célèbre cité à proprement dite, croisant les 200 et derniers autres élus de la journée autorisés à gravir ces pentes à partir de 10h... Et Parmi eux, les deux colombiens rencontrés la veille et que nous retrouvons avec plaisir en ces lieux !!!
De retour sur le site du Machu Picchu, sous le soleil, nous prenons vraiment le temps de visiter chaque place, chaque rue, chaque pièce accessible, essayant d'imaginer avec peine comment la vie y prenait forme... Car oui, même aujourd'hui, il est encore impossible de savoir à quoi tout cet ouvrage servait:
Était-ce un centre religieux comme le laisse penser nombre d’édifices cérémoniels ? Était-ce une forteresse avancée servant à protéger Cuzco des peuples sauvages d’Amazonie comme le laisse
penser la présence, aussi minime soit-elle, d'un mur d’enceinte et de douves ? Était-ce le dernier refuge des Acclas, «Vierges du Soleil», dévouées à l’empereur comme le laisse penser les 150
restes d'humains féminins sur les 173 au total trouvés sur place ?
Était-ce simplement une cité royale construite pour l’empereur Pachacùtec comme le laisse penser sa démesure ?
Était-ce un grand centre agricole comme le laisse penser ses importantes zones de culture ?
Ou était-ce un centre de désintoxication pour martiens en transit drogués au Pisco Sour et à la feuille de coca comme le laisse penser mon esprit malade ?
Rien ne peut être réellement affirmé aujourd'hui, hormis le plaisir que nous prenons à découvrir cette majestueuse cité.
Après quelques nouvelles centaines de photos prises (pour lesquelles nous apprenons d'ailleurs à nos dépends qu'il n'est pas autorisé de danser, de sauter, de courir ou encore de s'alimenter sur le sanctuaire... nous sommes à deux doigts de retrouver la sortie du site en rampant de peur des répressions, les gardiens ayant finis par ne plus nous quitter des yeux !!!), afin de nous dégourdir les jambes après une journée à peine fatigante du point de vue physique ;-), nous décidons... De nous rajouter 2 heures de marches supplémentaires !!! Direction la "Puerta del Sol" d'où le point de vue sur le Machu Picchu et la vallée en contre-bas présente des airs de récompense ultime.
De retour sur le site, nous décidons de regagner Aguas Calientes et notre auberge en bus, épuisés mais satisfaits par nos efforts de la journée... Après Gandalf, ce serait au tour de Rocky d'être
fier de nous !!!
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Candice (mardi, 22 avril 2014 10:12)
Tout simplement magique! Et quel effort!
Gros bisous xxx
Aline (mercredi, 23 avril 2014 22:30)
Waouh.............
Photos magnifiques, vous avez du passer un moment incroyable !!!!
Blandine (vendredi, 25 avril 2014 02:39)
Je viens de le vivre avec vous ! Magnifique, il me tarde de connaitre cette joie , bonne route en Argentine
Delphine & Benoit (vendredi, 25 avril 2014 12:39)
super photo! à agrandir et à encadrer aussitôt rentrés!
Manon (mercredi, 28 octobre 2015 09:06)
Super article et photos !!! J'y vais en août et je pense aussi faire le Huayna Picchu, l'altitude ne gêne pas trop ? D'où a été prise votre dernière photo ? Elle est magnifique !!!!
Romy (mercredi, 28 octobre 2015 11:39)
Bonjour Manon, merci pour ce commentaire :-)
L'altitude ne te gênera pas si tu as l'occasion de passer 2/3 jours avant sur Cuzco ou Agua Calientes. Il faut réserver ta place assez tôt pour pouvoir gravir le WaynaPicchu (nombre de places limitées par jour). Et la dernière photo a été prise sur la petite colline en face du Wayna. Profite bien du Pérou!